jeudi 16 septembre 2010

Formation inattendue

Vendredi dernier ou celui d'avant, je suis allée au lac histoire de me rafraîchir un peu avant de rentrer chez moi.

Vous vous souvenez de la dame polonaise que j’avais rencontré au milieu du lac en juillet? Elle était là et semblait m'attendre... de pied ferme.

- Vous être femme sérieuse ? qu’elle m’a demandé dès qu’elle m’a vue. Vous vouloir cueillir champignons cet hiver Alinka ? qu’elle a ajouté.

- Cet hiver ? On ne cueille pas de champignons l'hiver... du moins je crois pas, ça se fait vraiment? que je lui ai répondu trop étonnée par son étrange question. Quand le brouillard de mon cerveau s'est dissipé, je me suis souvenue qu'à notre première rencontre elle m’avait parlé avec passion des champignons sauvages et à ce moment là j’ai dû lui dire que j’aimerais bien apprendre… mais je n’avais pas donné suite.

Le ton m’indiquait l’impatience mais le nom qu’elle venait de me donner, Alinka, en était un affectueux. J’ai un peu de difficulté à discerner l’intention derrière l’intonation car le polonais est une langue gutturale; la dame a un accent fort, intense, passionné qui brouille un peu mon système de décodage.

Je crois qu’elle en avait assez d’attendre et qu’elle avait décidé que c’était aujourd’hui qu’elle me donnait un cours. D’ailleurs elle était très bien préparée.

Après m’avoir donné un peu de théorie, elle m’a prise par le bras pour me traîner dans le bois (elle pouvait pas me tirer par la manche, j’étais déjà en maillot de bain). Cette situation était beaucoup trop étrange pour que j’y résiste. Ça m'étonnait et m'amusait à la fois.

Elle se penche pour cueillir un champignon….

- On fait comme ça, ou comme ça… on arrache jamais, jamais. Elle explique qu'il ne faut pas jamais toucher à ... (un mot polonais que j'ai traduit par mycelium). Toi pouvoir revenir dans quelques jours et trouver d'autres champignons ici. Nature généreuse, faut protéger. Ton tour, montre moi si tu as compris.

Elle me montre toutes les caractéristique du champignon… le chapeau, le dessous, la queue (qu’elle prononce la cu - ce qui me fait sourire chaque fois).

- Toi doit observer tout ça… maintenant, continuer. Quand vous promener dans le bois, pas regarder n’importe où… regarder par terre. Maintenant tu trouves un champignon, qu’elle dit soudainement en s’arrêtant.

Je regarde, ne vois pas grand chose… j’avance, en trouve un… je ressens l'enthousiasme d'une petite fille qui vient de gagner une chasse au trésor.

- Non, pas lui… toi allée trop loin, faut bien regarder !

En revenant sur mes pas, j'ai trouvé celui qu'elle voulait que je vois.

- Lui être même sorte que le premier ?

J’observe tout ce qu’elle m’a appris et malgré qu'il a une teinte un peu différente, j’en conclu que oui.

- Bien. Pourquoi alors avoir l’air différent ? qu’elle me demande avec une intonation que j'ai reconnue; celle d'une question piège.
- Parce qu’il n’a pas le même âge.
- Mais non mâdame ! qu'elle s'exclame, les baguettes en l'air.

J'avais subitement changé de statut... mâdame avait remplacé Alinka. Je m’étais souvenue qu’on en avait parlé la dernière fois et qu’elle insistait beaucoup pour dire que les livres ne disent pas tout… que les champignons étaient légèrement différents selon l’endroit où ils poussent. Je savais très bien que c’est ce qu’elle voulait que je réponde. Et j'avoue que ça m'amusait un peu de ne pas donner la réponse attendue.

- OUI c’est pour ça, que je lui répète en élève rebelle… Il n’a pas le même âge ET il n’a pas poussé dans les mêmes conditions, un était à l’ombre et l’autre au soleil.

- Bien, qu'elle dit de sa grosse voix rauque en inclinant la tête en signe d'approbation.

Après avoir cueilli quelques spécimens de trois variétés de champignons, je suis allée sauter dans le lac... avec sa bénédiction. Après une trentaine de minutes… je sentais un inconfort… comme si je devais sortir de l’eau.

La dame polonaise m’attendait avec la suite de ma formation. Elle avait apporté un panier et des sacs de coton.
- Cueillir avec ça, jamais cueillette avec sac de plastique, qu’elle m’a dit.

Elle avait également apporté un couteau et m’a appris à nettoyer, à éplucher et à préparer les champignons pour les faire sécher, les mariner, les congeler ou les faire cuire. On ne les coupe pas de la même façon.

-Ce champignon goûte le ciel sur la langue ! qu'elle m'a dit avec une intensité gourmande.

Elle était intarissable… certains champignons aiment les bouleaux, d’autres le gazon… elle m’a parlé de test organoleptique (ou quelque chose du genre).

- Je suis impressionnée par toutes vos connaissances, vous êtes vraiment spécialiste, que je lui ai dit en guise de conclusion.

- Oui, qu'elle m'a simplement répondu avec une belle lumière dans le regard.

Je me sens très privilégiée d'avoir eu cette formation inattendue. Malheureusement je n'avais pas mon appareil photo mais dans quelques jours j'y retourne et là j'aurai des photos et même des noms français pour ces champignons car en polonais je ne sais que dire bonjour.

Djindobre !

2 commentaires:

  1. Le mot queue en Polonais se dit "Ogone".

    Bonjour : dzien dobry
    au revoir : do widzenia
    enchanté : milo mi
    bienvenue monsieur, madame : witam pana, pani
    je vous en prie : prosze


    Czech Aly ! ;-)

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  2. Merci pour ce petit cours de Polonais !

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